"Nous sommes en 2048. L’ensemble des citoyens de la planète achève d’envoyer la totalité des ouvrages, documents personnels, factures et autres traces écrites ou numériques au siège de l’entité Godgle. Il suffit pour cela, pour les documents et livres papiers, de les scanner directement sur la table du salon qui dans tous les foyers, sert d’interface avec la base centrale de Mountain View. Pour ce qui concerne les documents électroniques, il y a déjà plus de trente ans qu’une loi a rendu obligatoire l’ouverture journalière d’un port dédié sur tous les micro-ordinateurs personnels et que l’ensemble des nos échanges numériques sont centralisées à Mountain Telecom qui a depuis 15 ans racheté l’ensemble des opérateurs téléphoniques. Les programmes télé et radiovisuels y sont également stockés." …
Pardon, je m’égare. A l’origine de cet égarement il y a l’ouverture officielle ce jour (16 novembre 2005) du service Google Base, qui est (je cite) une "extension de nos efforts pour centraliser ("collection") les contenus existants comme la navigation (‘web crawl’), Google Sitemaps, Google Print et Google Video". Je continue de citer : "Tout le monde, des grandes entreprises aux gestionnaires de sites jusqu’aux individus peut soumettre (sic) son contenu sous forme de données (‘data items’). Nous les hébergeons et les rendons accessibles gratuitement." Suivent quelques exemples d’utilisation avant de conclure ainsi : "Cette version béta est un petit pas supplémentaire vers notre but, créer une bases de donnée en ligne d’information facilement accessible et structurée."
Chacun appréciera mais il me semble que l’on n’est tout de même pas si loin de mes (piètres) égarements romanesques en début de billet.
De fait l’interface de GoogleBase vous permet de "soumettre" tout type d’information : des synopsis de cours, des offres d’emplois, des articles et des news, des profils d’individus (‘people profiles’) (sic), des services, des véhicules, etc …
Expérimentateur dans l’âme, j’ai tenté le coup et j’ai voulu soumettre le contenu du blog que vous êtes en train de lire.
- On commence par me demander de donner un titre à mon contenu. Ce sera simplement "Affordance. A blog upon information science."
- Puis j’ai la possibilité d’ajouter des attributs et des valeurs (pour faciliter la recherche) : auteur, taille (en gigabits), adresse web, adresse physique, etc … Je peux mettre plusieurs attributs. Ce sera donc Attribut "author" Value "Olivier Ertzscheid" et attribut "web adress" value "http://www.affordance.info".
- Je peux ensuite ajouter des "labels" (10 maximum) sous forme de phrases ou de mots-clés en complément des attribut, ainsi qu’une description (texte libre) et un contact (mon nom et mon numéro de téléphone) dont on me dit qu’ils seront publiés sur Internet (après tout je suis déjà dans les pages jaunes 🙂
Voila ce que cela donne alors. (ah oui j’oubliais, pour publier il faut d’abord s’identifier avec – par exemple – son compte Gmail)
Et hop. Mon profil Google s’enrichit désormais des "items" déposés dans GoogleBase.
Au delà de cettee petite expérience, quelques états d’âme : à la différence de Google Analytics ou de GooglePrint, le service marche très bien et semble faire face à sa prise d’assaut. A moins qu’il ne soit pas pris d’assaut … En tapant ce billet devant mon écran et à proximité de mon café, je me sens plus proche que jamais d’un certain Winston Smith.
Bienvenue en OceGoogleanie. Pendant ce temps …
Et puis si ce billet ne suffit pas à aiguiser votre curiosité, celui-ci (écrit en 2002) est aussi visionnaire qu’édifiant (via John Battelle)
Il semble bien que nous soyons passés dans la nuit à une nouvelle étape de la dérive des continents informationnels. Après avoir rendu indexable et "cherchables" (mais aussi marchandisables) l’ensemble des biens culturels (information, programmes télévisés, livres …) et des informations relevant de notre sphère intime (courriels), après avoir donc réuni cet ensemble en un continent unique, et avec maintenant cette ossature architecturale de base de donnée Google est en train d’y poser des frontières, s’arrogeant du même coup l’intégralité des droits de douane.
- Update(s) : le moins que l’on puisse dire est que les avis sont partagés :
- Prémisse du web sémantique ? "Si on pousse un peu plus loin, on peut se poser la question de rapports de tout cela avec le web, et surtout le web sémantique : dans le système Google base, les descripteurs sont à l’origine des entités du système, et collent au plus près aux besoins des utilisateurs. Il n’y a pas d’ontologie, mais un ensemble de labels permettant de créer des hiérarchies à la volée, complétés par des attributs. Si l’utilisation va dans ce sens, on pourrait considérer que Google base représente un outil de création de schémas d’annotation, de mise en place d’annotations/méta-données/items et de recherche dans ces items, soit une autre manière de se diriger vers un web "sémantique". De nombreuses questions restent posées, notamment celle des directions que prendra le projet, de son utilisation pour autre chose que la vente de voitures, mais aussi du facteur humain dans l’organisation de la connaissance." (Yannick Prié sur la liste du RTP-DOC)
- Base de donnée des années 80 ? "It’s like a 1985 dBASE file with less functionality. It’s ugly. It’s
centralized content with less functionality than ebay or craigslist.
The content is not integrated directly into Google search results, but
“relevance” can bump it up into main and local search (and froogle)" (TechCrunch) - Un retour d’expérience parmi d’autres (InsideGoogle)
- Point de vue documenté de Christophe Deschamps qui remarque que "Google montre une fois de plus sa phénoménale aptitude à l’innovation
en créant un service qui n’existait pas, ou alors de manière beaucoup
moins grand public" tout en regrettant le manque de fonctionnalités "sociales". - Le mieux pour se faire une idée : l’article de l’Atelier (le plus clair et le plus complet sur les fonctionnalités et les enjeux. Si vous trouvez mieux, les commentaires sont ouverts 🙂
- Update du 19 Novembre :
- "Google ne collecte pas toutes ces données structurées juste pour les régurgiter comme autant de "morceaux de viande" (piece-meal) suite à des requêtes hasardeuses. Il les collecte pour pouvoir construire la plus grande base de donnée XML du monde." La suite sur Burnham’s Beat
- Voir aussi l’analyse de Michael Parekh.
- Update du 21 Novembre :
- Google réinvente la classification à facette et la rend intuitive à l’échelle du monde. (Selon Rasmisinha)
Bonjour,
Je signale également qu’il y a deux billets intéressants sur le blog de Charlene Li (http://blogs.forrester.com/charleneli/).
Sinon, concernant l’impact spécifique sur le recrutement (mon dada), j’ai aussi fait une petite bafouille 😉