Au programme de ce lundi matin une intervention dans le cadre du séminaire d’hiver du Syndicat de la librairie française (SLF) pour y parler des projets et des avancées en terme de numérisation de Google et de quelques autres. Une intervention d’actualité au regard des derniers événements en la matière. Avec pour bientôt le risque de voir se reproduire en France la situation qui oppose outre-atlantique les éditeurs et Google. L’occasion également de mieux cerner (mais pas suffisamment, j’ai comme d’habitude été un peu trop long … pour vous en rendre compte par vous-mêmes : Download distribslf.ppt
…) la position des libraires en ces terres numériques. Car au coeur de la chaîne de "métiers du livre", on entend beaucoup parler (ou on parle beaucoup) des bibliothèques, des éditeurs, des auteurs, mais peu, très peu de la position des libraires. Avec une situation délicate à plus d’un titre autour de ce (beau) métier qui est de faire commerce du livre, des livres, et qui fait que les positions (différentes) de cette profession sont prises en étau entre les vues des grossistes du livre (Amazon par exemple) et des éditeurs. Ce qui est ressorti de cette demi-journée fut (ce dont je me doutais un peu) que les libraires ont des choses à dire en la matière. Intéressant également d’écouter l’argumentaire rapporté de ceux (les libraires toujours, mais surtout les "petits" libraires "indépendants") qui ont "franchi le pas" et qui attendent beaucoup (trop ?) de l’affichage ciblé des liens sponsorisés via cette interface de consultation mondiale qu’est Google. "L’ombre" qui plana sur cette matinée fut celle d’une évolution possible des ambitions de Google en termes de services marchands autour de son offre de livre. Pour le dire autrement, la possibilité qu’il mette en place, sur le modèle des "vidéos à la demande" un service de "Livres à la demande". Auquel cas le (très) court métrage d’anticipation EPIC aurait vu juste en annonçant l’avènement d’un GoogleZon (=Google rachetant Amazon). Sans forcer le trait des scénarios d’anticipation (ce qui est toujours délicat avec Google), tout le monde s’est au moins accordé, me semble-t-il, sur le fait que l’erreur serait de ne pas se poser la question en ces termes, ou de ne pas envisager comme "possible" une telle éventualité. Les points de débat furent comme on peut s’en douter nombreux et l’auraient été davantage si j’avais réussi à faire plus court (mais comme disait l’autre, "je n’ai pas eu le temps"). Voici quelques impressions "à chaud" :
- les libraires connaissent suffisamment leur métier (les livres) et leur public pour ne pas qu’on leur refasse le coup de la disparition du "livre-papier" comme ce fut le cas il y a quelques années avec la révolution mort-née du E-Book.
- Ils sont très conscients qu’avant d’être quantifiable en termes de dispositifs techniques de lecture, la question de la numérisation est D’ABORD une question d’usages et d’éducation (au sens Flaubertien du mot, c’est à dire un "parcours de vie").
- Et ils maîtrisent mal (comme tout le monde) l’évolution de ces usages. Le public-lecteur est-il prêt (et en a-t-il le souhait ou le besoin, avant en tout cas que ce besoin ne soit créé artificiellement par les grands numérisateurs), le public lecteur est-il prêt, disais-je, à consommer du livre comme il consomme de la musique ? Le monde de l’édition et de la librairie amorcera-t-il le même virage que celui des majors musicales en favorisant et en incitant à la vente fragmentaire (j’achète un euro un morceau d’un album) et en créant à tout force marketing les produits qui répondent à ce type de demande (vous avez déjà essayé d’écouter un album de la StarAcadémie ou de Kylie Minogue** en entier ?).
- Autre point de vue (pas la place ni le temps de tous les relater), celui qui rappelle, O combien justement, qu’aujourd’hui TOUT dans le processus de fabrication du livre depuis le manuscrit (tapuscrit) jusqu’aux ultimes épreuves est DEJA numérique. Et que, exception faite de la numérisation rétrospective, la "numérisation" n’est peut-être pas le meilleur angle de débat (ou en tout cas celui qui pose le plus de problèmes) : le "numérique" envisagé du point de vue des nouvelles marchandisations et des nouveaux usages qu’il permet pourrait être un meilleur angle.
Beaucoup de choses donc dans cette courte matinée, et beaucoup de débats à venir, avec un métier qui a des choses à dire et qui s’il n’est pas (me semble-t-il) toujours entendu comme il devrait l’être, mérite d’être très attentivement écouté. Ce qui sera probablement le cas lors de cette journée de la SGDL. Ne manque plus qu’un blog de la librairie indépendante pour porter publiquement encore davantage la voix de ceux qui connaissent aussi bien le livre que les lecteurs 😉
Il est 12h30 et la journée continue. Un p’tit coup de RER B et me voilà à l’ENS Cachan (temps lointain de l’hypokhâgne…) pour parler cette fois de "moteurs de recherche et de référencement". Le tout en 3 heures. "Votre mission, si vous l’acceptez …" L’occasion (notamment) de mettre (enfin …) à jour et (surtout …) au propre un support de cours décent sur ces questions : Download ens.ppt (50 diapos en 3 heures, forcément j’ai pas eu le temps de parler de tout mais l’essentiel – j’espère – est passé).
Merci en tout cas à tout le monde pour l’acceuil (chaleureux) et les contacts (enrichissants).
Moralité : il est bon de parcourir le monde (surtout quand le RER B est à l’heure)
**Nota Bene : les artistes chanteuses produits cités dans ce billet le sont à titre d’exemple et ne reflètent en rien mes goûts musicaux personnels ;-).
Merci de votre intervention, très claire et pédagogioque au SLF.
Etant actuellement le Président de la Féderation Internatioonale des Libraires et ayant de larges aquintances avec EBF ( la Féderation Europèene libraires) je réalise combien les libraires sont peu informés des enjeux du numerique.
La veille téchnologique est des plus difficiles pour nous.
De plus je suis persuadé que les éditeurs vont accelerer la vente directe. Des secteurs entiers comme le droit, entreprise , medecine sont deja en majorité par vente directe.
Le numerique risue de renforcer cette tendance.
Je garde vos coordonnées pour l’avenir.
C’est vraiment la question des concequences pour nous libraires que j’aimerais creuser pour un de nos prochains congrès.
Pour contacter les Féderations de Libraires Europe & Internationale.
http://www.ibf-booksellers.org