Liens affinitaires et réputation générationnelle

On s’en doutait mais depuis que Jean l’a démontré, il est clair que les moteurs marchent à l’affectif, ou plus exactement aux liens d’affection. Une étude récente souligne de manière alarmante (alarmiste ?) une nouvelle quadrature de la pertinence liant Google, Wikipedia, MySpace, et Blogger. Ce que partagent ces sites, c’est un public. Ce qui les relie c’est le traffic. "Wikipedia obtient 54% de son traffic via Google. La majorité des visiteurs de Wikipedia se rendent ensuite sur MySpace ou Blogger, qui utilisent tous deux Google comme service de recherche." Et là … la logique affinitaire se met en place. L’article qui rend compte de l’étude (Nota Bene : je n’ai pas lu l’étude originale) indique que BigDaddy (nouvelle mise à jour de l’algorithme de Google), pour éviter le spam et autres linkfarming, étudie de près et pondère davantage les "bons et mauvais voisinnages Internet". En d’autres termes, tous les liens entrants ne sont pas traités de la même manière. Ce qui n’est pas nouveau, puisque c’est précisément la pondération à rebours des liens entrants qui constitue le coeur de l’algorithmie du PageRank. Ce qui en revanche est nouveau (toujours selon l’article rendant compte de l’étude), c’est le fait que les liens en provenance de MySpace et les contenus de Wikipedia sont surpondérés. Google réinventant ainsi selon une logique très américaine la limite entre l’axe du bien et celui du mal pour les voisinnages de liens. Tout cela me laisse un peu perplexe : si je n’ai aucun doute sur la surpondration de Wikipedia, j’attendrai de pouvoir lire l’étude originale pour ce qui est de MySpace. Mais la suite de l’article avance un point crucial : les 110 millions d’utilisateurs de MySpace sont des préadolescents. Et la moyenne d’âge des wikipédiens (wikipédistes ?) est majoritairement celle de jeunes adultes. Sur ces deux éléments, aucun doute. Il y a donc une véritable bascule générationnelle de l’autorité (ça va plaire aux ségoléno-sarkozystes de tous poils …) qui donne la primauté de la pertinence et de l’expertise à une génération jusqu’ici plus habituée à jouer les prescripteurs pour différentes marques de soda. Les frontières de l’autorité cognitive s’ouvrent. Et c’est une bonne chose. Mais que ce déplacement des frontières cognitives repose sur la volonté de quelques-uns de marchandiser des réseaux sociaux massivement émergents pose à coup sûr problème. Et l’enjeu est de taille. Si l’on ne veut pas que le couple "confiance générationnelle" et "défiance informationnelle" décrit dans ce billet, ne finissent par exclusivement se décliner selon les modalités d’une aveugle confiance informationnelle en des outils surfant sur la vague d’une énième défiance générationnelle.
(Via Steve Rubel)

2 commentaires pour “Liens affinitaires et réputation générationnelle

  1. Hum … peut-être qu’en ce qui concerne l’analyse faire par Sam Vaknin, Ph.D., l’adjectif « alarmiste » conviendrait en effet mieux qu' »alarmante ». L’article de Heather Hopkins sur son blog (http://weblogs.hitwise.com/heather-hopkins/2006/10/wikipedia_where_do_people_go_a_1.html) dit en effet que 54% du traffic entrant de Wikipedia vient de Google, mais est-ce un si gros chiffre pour une encyclopédie ? Pour le traffic sortant, MySpace est en bonne position (7e) mais je ne vois pas Blogger dans les 20 premiers. Et l’analyste parle de certains sites qui se distinguent comme des « autorités » dans leur domaine mais il s’agit de « Amazon, IMDB, and BBC News ».
    L’article de Sam Vaknin est de son côté assez curieux. Non seulement il ne met le lien vers l’étude de Heather Hopkins, mais encore il parle de résultats qu’il a pu lui-même constater en « suivant 154 mots-clés sur Google depuis 1999 ». Ces résultats prouveraient que le nouvel algorithme de Google favorisait les liens en provenance de MySpace. Simplement aucun chiffre ne vient etayer cette affirmation, ce qui est étonnant pour quelqu’un qui observe la chose depuis 1999.
    A prendre avec des pincettes, donc.
    Disclaimer : cette remarque est juste pour compléter le post d’Olivier dont je lis avec beaucoup d’intérêt les articles sur ce blog.

  2. Est-ce que ce glissement de l’autorité des documents, -de la légitimité des auteurs au calcul d’une audience- ne s’accompagne pas aussi d’un éclatement du document, qui fait que le parcours offre plus de contenu sémantique que les fragments de document visités ? Hypertextualité, calcul de l’audience.. et possibilité pour les moteurs d’influencer les parcours. L’infomédiation ne consiste plus dans la revente de données, mais dans la revente de réseaux. Evidemment sans aucune visibilité et selon des processus de consommation insensibles à l’usager. Il faut faire des formations documentaires dans tous les cursus universitaires, c’est urgent.

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