Usagers de la bibliothèque hybride

La bibliothèque hybride désigne les services de la bibliothèque "habituelle", conjugués à ceux de la bibliothèque numérique et de la lame de fond du web 2.0, à savoir l’ensemble des outils et techniques qui permettent à l’usager de davantage "faire-compétence" avec l’entité bibliothèque par le biais de l’indexation sociale (folksonomies), du couplage des OPAC avec les bases d’éditeurs commerciaux ou du renvoi depuis les moteurs de recherche vers des pages d’OPAC, et du cataloguage "partagé" sur le modèle de – par exemple – LibraryThing. (Pour une définition plus approfondie, voir le BBF). Quatre bibliothèques Danoises ont eu la riche idée de nous livrer en 69 pages le produit d’une étude et d’une réflexion sur les attentes et les comportements des usagers de ces bibliothèques hybrides (.pdf), autour de trois points : l’amélioration de l’interfaçage web du catalogue, le rôle des employés de cette bibliothèque hybride et la place de la bibliothèque "physique".
Parmi les principales conclusions :

  • l’étude distingue 3 grands types d’usagers : l’enthousiaste ("library enthusiast"), qui connaît par coeur la bibliothèque, ses services et ses employés. A l’autre extrême on trouve l’abeille travailleuse ("worker bee") qui travaille et utilise les outils seul(e) dans son coin. Et entre les deux, l’usager "drive-in" ("drive-in user") qui utilise la bibliothèque pour des tâches très orientées, ponctuelles et spécifiques.
  • l’étude montre également comment chaque type d’usager met en place des stratégies différentes pour la sélection et l’évaluation de l’information.
  • Elle souligne aussi l’importance que revêt, pour tous ces usagers, la présence sur le net du catalogue de la bibliothèque.
  • Autre point qui me paraît crucial, quand on interroge les usagers sur leur relation à la bibliothèque (= leur relation au savoir), ils sont une majorité à se dire suffisamment autonomes pour le choix et la validation des sources.

Et on touche là un point critique de la bibliothèque hybride mais aussi de la "génération Google", à savoir le renversement dans les modalités d’appropriation du savoir, qui après avoir pendant des décennies nécessité la compétence experte et le guidage avisé d’un bibliothécaire, paraît ( et est parfois) aujourd’hui totalement intuitif et transparent pour les usagers. Du coup, ce qui était auparavant une méconnaissance de la valeur ajoutée des bibliothèques du fait de la complexité du repérage des sources et des modalités d’interrogation devient aujourd’hui une méconnaissance semblable à la précédente mais fondée sur l’illusion de facilité, de transparence et d’exhaustivité véhiculée par les interfaces des moteurs de recherche. Mais pour l’une et l’autre de ces deux époques, la valeur ajoutée et la raison d’être des bibliothèques n’a pas variée d’un iota : elle repose sur l’accès raisonné à des sources validées. Pour ne pas être définitivement distancées, il devient plus qu’urgent pour les bibliothèques de franchir "le pas de l’usager" en proposant des interfaces et des services ouverts et collaboratifs inspirés de l’usage des moteurs de recherche (appelons-ça, pour faire simple, des services 2.0)

  • toujours à ce propos, l’étude souligne alors le fossé qui sépare le point de vue des usagers ("je suis capable de choisir et d’évaluer mes sources") et celui des bibliothécaires ("ils – les usagers – ne consultent pas les bonnes bases, ne les interrogent pas correctement, passent à côté d’information cruciale, …")
  • Autre point, le plus important (et le plus urgent) pour les usagers tient à l’amélioration du catalogue et de son interface : les idées "remontées" par les usagers à la question "comment l’améliorer" recommandent d’ajouter aux notices catalographiques des résumés et des tables des matières, ainsi que des listes d’affinités (ceux qui ont emprunté ceci ont aussi emprunté cela), ainsi que des compte-rendus de lecture. Un OPAC Amazonifié donc.

Bien que réalisée auprès d’un échantillon d’une soixantaine d’usagers, la présentation de l’étude, l’analyse des réponses et le choix des recommandations sont d’une remarquable acuité. A lire donc absolument (.pdf).

(Via la liste NCG4LIB)

6 commentaires pour “Usagers de la bibliothèque hybride

  1. Les services d’Amazon n’ont pu se développer que grâce au nombre élevé des clients-contributeurs. La transposition en bibliothèque n’est pas garantie : même la notice de Worldcat toujours citée en exemple n’a suscité aucun commentaire supplémentaire depuis un an (
    http://www.worldcat.org/oclc/50920659?tab=reviews ). Il y a donc une question d’implication dans une communauté d’utilisateurs.
    Le 2.0, libre ou commercial, fonctionne par communautés virtuelles. Pour qu’il puisser se transformer en « services publics 2.0 », cela nécessiterait de coordonner des moyens nationaux (Sudoc/Catalogues fusionnés des BM) avec des implications locales (communautés réelles, services locaux).

  2. Enquête : les usagers de la bibliothèque hybride

    Nos collègues danois ont fait une enquête sur les attentes et les comportements des usagers des bibliothèques hybrides (une soixantaines d’usagers). Une bibliothèque hybride « désigne les services de la bibliothèque « habituelle », conjugués à ceux d

  3. Merci pour cette intéressante synthèse!
    La remarque de B&C est très juste. Il s’agit de favoriser la création de communautés mais en même temps de coordonner le global et le local et le public et le privé… Mais ce n’est pas toujours gagné…
    Car il aussi est plus facile (et moins couteux…) de « disséminer » les accès à la bibliothèque (via les api sur amazon par exemple) pour bénéficier des communautés déjà existantes et à partir de là de orienter les usagers vers la bibliothèque locale…ce qui ne doit pas servir, bien entendu, de justification au maintien de catalogues « secs » tels que nous les connaissons, aucontraire je crois que c’est une vraie opportunité d’amener du trafic sur nos sites et d’orienter les elcteurs dans la longue traîne des bibliothèques!
    J’approfondirai ce point sur mon blog, à partir du 6 novembre. 😉

  4. Enquête : les usagers de la bibliothèque hybride

    Nos collègues danois ont fait une enquête sur les attentes et les comportements des usagers des bibliothèques hybrides (une soixantaines d’usagers). Une bibliothèque hybride « désigne les services de la bibliothèque « habituelle », conjugués à ceux d

  5. Usagers de la Bibliothèque hybride : enquête

    Nos collègues danois ont fait une enquête sur les attentes et les comportements des usagers des bibliothèques hybrides (une soixantaines d’usagers). Une bibliothèque hybride désigne les services de la bibliothèque habituelle, conju

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