"Je ne laisserai personne dire que des choix budgétaires se font aux dépens de votre sécurité. C'est faux. J'en serai le garant.".
Emmanuel Macron. 20 Juillet 2017.
"Ne parlez pas de répression ou de violences policières, ces mots sont inacceptables dans un Etat de droit. (…) Je refuse le terme de violences policières".
Emmanuel Macron. 7 mars 2019.
"Je ne laisserai personne dire qu'il y a eu du retard sur la prise de décision s'agissant du confinement."
Edouard Philippe. 28 Mars 2020.
En démocratie rien n'est plus oppressant, rien n'est plus inadéquat, rien n'est plus contraire à l'esprit même de la démocratie que de priver les gens du langage. La période de confinement, qui nous prive tous de proches et de cette autre proximité qu'est la rue en cortège, la période de confinement ne laisse à beaucoup d'entre nous que les mots. Vouloir nous en priver est inconcevable, coupable, et dans un sens criminel.
Quelle est cette démocratie ? Quel est ce pouvoir ? Quel est ce projet politique ? Il y aurait donc leurs mots à eux, eux qui ont le droit aux mots, qui distribuent de la "résilience" à chaque nouvelle opération masquant chacune de leur incompétence, de leur incurie, ou de leur connivence ? Eux ils auraient le droit aux mots et nous, nous qui ne sommes "personne", nous n'aurions le droit qu'au réel sans la possibilité de le nommer ? Ou alors uniquement avec les mots qu'ils nous auraient laissé ? Qu'ils auraient choisi pour nous ? Ou qu'ils estimeraient nécessaire d'en permanence reformuler ?
Un gouvernement à ce point "en marche" face à un pays et à un monde à l'arrêt. Les mots ne mentent pas, ils annoncent, ils préfigurent un réel. Instable. Mouvant. Appartenant à chacun. Et aux autres. A personne. Et à tout le monde. En même temps.
"Le langage est le lieu de l'attention" écrivait Maurice Blanchot.
L'interdire, le refuser, le faire taire, le récuser, ne pas laisser dire, "je ne laisserai personne dire", c'est littéralement interdire de porter attention aux êtres et aux choses. C'est un programme politique. Parmi les pires possibles. Et c'est le leur.
A rebours. A rebours de l'expérience vécue, concrète, directe. A rebours de l'expérience sensible, documentée. Pour les violences policières hier comme pour la gestion de la crise sanitaire aujourd'hui. A rebours non pas de la vérité mais de la véracité, c'est à dire des formes de réel observables et vérifiables sur lesquelles faire émerger un concensus permettant de faire société. Et surtout à rebours de la langue elle-même. Sans la possibilité de dire, il n'y a pas de possibilité de vivre autrement que soumis et meurtri. Alors oui.
Oui il y a eu des choix budgétaires qui se sont faits aux dépens de notre sécurité. Sanitaire. Et ce devrait être le premier devoir d'un homme d'état que de précisément le laisser dire. Que de permettre à chacun de le dire. Ce devrait être le premier devoir d'un homme d'état que de se poser en garant de cette liberté de dire et de nommer les choses pour ce qu'elles sont. Y compris quand elles contreviennent à ce qu'il pense qu'elles devraient être. Pour que la dimension performative du langage permette, au sortir de cette catastrophe, d'en mesurer et les causes et les responsabilités. Pour que cette dimension performative du langage ne se réduise pas à la simple performance d'un acteur moyen sans réel talent, surjouant des émotions qui sont les dernières à lui permettre de se croire un homme d'État.
Le répéter. Inlassablement.
Oui, Emmanuel Macron, il y a eu des choix budgétaires qui se sont faits aux dépens de notre sécurité. Sanitaire. Tes choix.
Oui, Emmanuel Macron, il y a eu des violences. Policières. Des mutilations. Des blessures de guerre. Celles de ta police. Sous ton commandement.
Oui Edouard Philippe, il y a eu du retard sur la prise de décision s'agissant du confinement. Retard de ton gouvernement. Probablement criminel.
Oui maintenir le premier tour des élections municipales était aussi certainement irresponsable que criminel.
Il faut le dire. L'écrire. Le hurler. L'afficher. Le filmer. Et continuer de le documenter.
Nous qui ne sommes personne nous allons le dire. Nous allons l'écrire. Nous allons le continuer. Nous sommes personne et vous allez nous laisser dire. Avec un site. Juste pour l'occasion. Pour le dire dans le dernier espace public inaliénable en temps de confinement. Celui du web. Voilà ce que cela va donner. Simple. Basique :-)
il y a eu du retard sur les mesures de confinement => ilyaeuduretardsurlesmesuresdeconfinement.fr
On se retrouve là-bas. Il y a aussi une pétition. Pas pour le plaisir de pétitionner mais pour que chacun retrouve sa place de "personne" et pour afficher la capacité, si dérisoire et pourtant si déterminante de dire ensemble. Le lien aussi vers une initiative importante et lucide. Et quelques autres infos encore. On se retrouve là-bas. Parce que oui. Il y a eu du retard sur les mesures de confinement. Mais vous ne confinerez pas notre colère.
"Ne pardonne qu'à l'innocence." Maurice Blanchot. Encore.
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Rappel des épisodes précédents.
- La peste et le Corona. Episode 1. "La peste et le Corona." 04/03/2020
- La peste et le Corona. Episode 2. "L'humanité malade du Corona : ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés." 20/03/2020
- La peste et le Corona. Episode 3. "Coronavirus : les premiers désaccordés." 25/03/2020
Et aussi pour se souvenir, donc.
Merci.
Normalement le truc de la bourgeoisie française c’est de ne rien écouter, et non d’imposer le silence. Donc en un sens, le gouvernment actuel nous fait gagner du temps…