Il y a eu ces dernières heures beaucoup de reportages interrogatifs, perplexes et essentiellement moqueurs autour du dernier meeting de Trump dans lequel il a littéralement passé près de 40 minutes à envoyer de la musique après avoir expédié quelques éléments de discours de campagne. Quel candidat à la présidentielle se transforme en DJ ou lance des playlists lors d’un meeting de campagne ? Le cas semble en effet inédit à cette échelle. On peut bien sûr s’interroger et s’inquiéter (Trump est en lui-même une source perpétuelle de questionnements et d’inquiétudes) mais on peut aussi y voir une forme de confirmation. Trump ne s’adresse plus qu’à la pulsion. Et son public vient au spectacle pour écouter. Il ne s’agit plus de mots mais de battements. Le discours politique est vide, les mots de la politique ne sont plus qu’un préliminaire et un prétexte littéral à des sons. Il ne s’agit plus de communiquer mais de communier. Ou plus exactement de faire de la communion la forme ultime et seule légitime de communication (politique).
Christian Salmon a théorisé en 2007 l’ère du Storytelling (en politique notamment et pour les campagnes présidentielles américaines précisément), il a ensuite fait la même chose des années plus tard avec l’ère du Clash au regard là encore notamment de différentes personnalités élues comme Trump mais également Bolsonaro, Milei et malheureusement tant d’autres. L’ère du clash et de ce qu’il appelle « un âge post-narratif« .
Nous voici en 2024 et Trump en campagne passe donc essentiellement de la musique. Après le Storytelling, après le Clash, voici peut-être donc une nouvelle ère, celle de la Beat Politique. Une politique pulsionnelle, qui ne donne plus à voir ou à penser mais juste à écouter, une politique du BPM, du battement par minute.
Si la place de la musique (et des artistes du domaine) est tout sauf nouvelle en politique et dans les meetings de campagne, si ces derniers sont toujours rythmés par de la musique en ouverture et en clôture, ce que fit Trump l’autre jour demeure inédit. Tout comme est inédite, par exemple, la capacité virale de mobilisation d’une artiste comme Taylor Swift, dont Trump à fait l’une des premières de ses adversaires dans la course à la Maison Blanche. Beat Politique encore. Qui s’inscrit dans un âge crépusculaire de spectacularisation.
Dancing Trump.