13 septembre 2010. J'allume ma radio. Il est 11h30. J'habite un pays dans lequel le président de la république utilise les services de l'état pour faire espionner un magistrat suspecté d'être à l'origine de fuites dans la presse sur une affaire de trafic d'influence touchant – au moins – un ministre et – probablement – le chef de l'état lui-même.
Il est 13h. Flash Info. J'habite un pays dans lequel on apprend que le magistrat qui fut aussi la "source" des journalistes est, soudainement, muté en Guyane.
Il est 14h. Lecture du journal. J'habite un pays que l'ONU et que le parlement Européen condamnent pour sa politique menée à l'égard des Roms.
J'habite un pays dans lequel le ministre de l'intérieur édicte une circulaire illégale, inconstitutionnelle et raciste. 13 Septembre 2010. Il est 15h. Flash Infos. J'habite un pays dans lequel le ministre de l'intérieur réécrit à la hâte, la même circulaire illégale, inconstitutionnelle et raciste.
Il est 17h. J'habite un pays où le ministre de l'immigration et de l'identité nationale dit n'avoir aucune connaissance d'une circulaire illégale et raciste pendant que ses collègues parlementaires expliquent que la France n'a pas de leçons à recevoir de l'Europe ou de l'ONU et qu'elle continuera de régler le problème de la pauvreté et de l'immigration avec des circulaires illégales et racistes.
J'habite un pays ou pendant que l'un ignore les circulaires relevant de son ministère, les autres les assument et les revendiquent, et le troisième les réécrit à la hâte. Faut dire aussi que j'habite un pays ou le ministre de l'immigration et de l'identité nationale était occupé à se marier quand on a découvert cette circulaire illégale et raciste. J'habite un pays où on ne peut pas être à la fois au four et au moulin. Jean Dutour et Jean Moulin.
J'habite un pays dans lequel un ancien cadre du parti socialiste désormais ministre de l'identité nationale d'un gouvernement de droite, se marie avec une jeune étudiante tunisienne, au ministère de l'immigration, ledit mariage étant célébré par une ancienne garde des sceaux elle-même "issue de l'immigration" et ayant – avant sa disgrâce – longtemps servi de quota de minorité visible d'un gouvernement de droite. J'habite un pays dans lequel même les symboles sont compliqués.
J'habite un pays dans lequel une affaire touchant un ministre est confiée au parquet plutôt qu'à un juge d'instruction, ledit parquet n'ayant de comptes à rendre qu'au … ministre.
J'habite un pays dans lequel les journaux qui expliquent tout cela sont dirigés par de dangereux gauchistes à l'obscur passé trotskyste et dont la seule motivation est d'attenter à l'intégrité et à l'honneur de Nicolas Sarközy de Nagy-Bocsa. J'habite un pays où, quand à quelques mois d'intervalle, 2 puis 2,5 millions de salariés descendent dans la rue pour défendre leurs droits, ils ne sont, selon la police, représentatifs de rien du tout.
J'habite un pays ou des milliers d'écoliers n'auront plus devant eux
que des étudiants à qui l'on a expliqué que le métier d'enseignant
pouvait s'apprendre en quelques heures de formation.
J'habite un pays où l'éducation, la santé publique, l'accès aux
soins pour chacun et surtout pour les plus pauvres est, chaque jour,
plus difficile, plus lointain.
Cela avait commencé il y a longtemps déjà. Je me souviens. 18 Mai 2007. J'allume ma radio. Le flash de 19 heures. J'habite un pays
qui se dote d'un ministère de l'immigration et de l'identité nationale. Comme une pelote de haine, de morgue, de mensonge, et de bêtise que l'on s'applique à dérouler et à dérouler encore. Flash info. J'habite un pays où l'on expulse des enfants à la sortie de l'école. Flash info. Encore. J'habite un pays où l'on expulse même des poly-handicapés. J'habite
un pays dans lequel à chaque nouveau flash d'information, je dois me
pincer pour me dire que je ne rêve pas, que tout cela va s'arrêter, que
la raison va l'emporter.
Je pense à ceux, je pense aux luttes. Qui ont permis que 3 mots figurent aux frontons des mairies. Je pense aux frontons fissurés. Je pense au sens, perdu dans ces lézardes. Je pense à ceux qui ont, un temps, habité le pays des droits de l'homme.
J'habite un pays. J'habite un pays dans lequel je voudrais, trop souvent, ne faire que passer.
<Update> "Ah not'môssieur, ah not'bon maître, pourquoi ont-ils tué … Jaurès" </Update>
Un pays
S’il n’y avait qu’un billet à lire ces jours-ci, c’est bien celui-là : j’habite un pays – Quelques jours en Sarkozie. J’y suis à 100%. Rien à dire par contre sur la queue basse des syndicats. Je les méprise.
Dit comme ça forcément… j’avais déjà pas la patate, je vais aller me pendre avant de dormir 😉
Plus sérieusement, belle écriture… un peu trop réaliste peut-être mais on ne peut pas vous le reprocher. Merci.
tellement juste et tellement flippant
Cher Monsieur,
Bravo pour cette analyse.
Il y a une solution : partir de France. J’ai une chance insolente de posséder 2 nationalités et rendre celle trop lourde à porter depuis des mois. J’attends de voir la réaction des autorités quand je rendrais mon passeport Français et demandant la déchéance de cette nationalité.
Où suis-je ? Je suis à Phon Pisai, prof en Thaïlande. Un vrai bonheur. L’Europe ? Non, enfin, si, mais ce sera la Suisse.
Au revoir France, j’ai l’impression de dire au revoir à un bâteau…à la dérive.
Bâteau…bateau bien sûr.
Vous voyez, je ne sais plus le Français !
Bravo Olivier !
Voilà six ans que je n’habite plus ce pays, et bien plus d’années que cette nationalité reçue en héritage m’est devenue problème. Comme toute nationalité d’ailleurs.
À cette époque où tout est mondial lorsqu’il s’agit de biens matériels ou immatériels, quel curieux anachronisme que d’encore se draper dans une nationalité, quelle qu’elle soit.
Donnons une définition juridique positive à l’apatride, comme Stallman et Moglen donnèrent une définition positive du logiciel libre. Nous pourrons alors choisir de devenir apatrides, redevenir simplement humains et membres de l’espèce humaine. Toute autre qualification de l’individu n’est que fondement de la discrimination.
Je ne sais plus qui disait (si tant est que cela soit une personnalité) que la démocratie était une forme de dictature. On peut ajouter la pire dans ces cas.
Où comment une minorité de cons arrive à emmerder la majorité et d’autres minorités non désirable à ses yeux, pour satisfaire une petite minorité d’ultra con*.
Nous n’aimons décidément pas la même France que ces gens là…
* hausse de 20% (à vérifier) de la popularité de M. Sarkozy auprès des sympathisants FN. Bravo !
Bravo pour cette analyse fine, pertinente et sourcée !!!
Vous habitez surtout un pays dans lequel les gens en ont assez d’être dirigés par une intelligencia médiatico-philosophe gauchiste qui n’a aucune légitimité et qui n’a fait, en 20 ans, que nous mettre dans une merde qui nécessite des mesures telles que celles que nous vivons en ce moment.
Bref, je pense qu’il est temps que vous partiez ! Bonne route, vous verrez l’herbe est toujours plus verte ailleurs.
Votre texte explique très bien la situation actuelle de notre pays et malheureusement je crains que d’autres mauvaises surprises vont encore arriver.
tout à fait anti Gaucho, on habite dans un pays dans lequel le discours officiel instille un climat de différence entre les composantes d’une nation, je rappelle à ce gouvernement que la République est UNE et INDIVISIBLE à commencer par son premier représentant. « les gens » comme vous dites ne peuvent vivre sereinement dans un tel climat, une vie de groupe ou des « communautés » au mieux se côtoient, au pire s’indiffèrent les unes aux autres premier pas vers la haine tout simplement.
Le problème c’est pas les politiques. C’est ceux qui ont voté dans ces politiques.
Avez-vous voté?
Moi, je ne peux pas, malheureusement.
C’est vrai qu’on doit être bien mieux ailleurs. Je trouve cela parfois insultant de se plaindre d’habiter un pays comme la France, lorsque de nombreuses personnes vivant dans la misère en font leur eldorado (peut-être à tort par rapport à ce qu’on peut leur offrir, malheureusement).
On doit surement être bien mieux en Chine, pays de la liberté d’expression bafouée, ou encore en Corée du Nord, à l’abri de l’ouverture au monde.
demandons un charter pour la France, celle qui est écrite au fronton des mairies
On sait que quelque chose ne va pas quand les arguments pour s’opposer à nous sont respectivement la théorie du complot et la comparaison au pire régime existant.
Très bon article, bravo.
Certes mais on pourrait tout aussi bien écrire Quelques jours en Mitterrandie sans que cela soit beaucoup plus reluisant… La corruption, le clientélisme, l’affairisme, la bêtise n’ont pas de couleur politique.
@Glam : si ça visait mes arguments, je peux prendre aussi des pays qui ne sont pas les « pires régimes existants » et allonger la longue liste des nations dont je fais mention (la Chine ne faisant pas partie, selon moi, d’un des pires régimes du monde, il y’en a tant d’autres, hélas).
Bravo.
Tout simplement.
Comme le dit Sfar dans sa BD préparant le film sur Gainsbourg : « Je crois que la chance de notre pays, c’est que les immigrés l’ont toujours vu plus beau qu’il n’est en réalité, plus généreux, plus noble. »
Bel article. Une amie souligne aussi le fait intéressant qu’en Sarkozie, le Ministre de l’Intérieur a été condamné pour injure raciale mais que ça, tout le monde semble s’en contenter parfaitement.
sub : je sais bien. Mais ça ne me semble jamais pertinent de dire « il y a pire alors chez nous ça va ».
Vous habitez un pays dans lequel personne ne s’étonne que des députés et des sénateurs votent une loi interdisant quelque chose aux femmes.
Moi je pensais bêtement que les lois féministes donnaient des droits aux femmes (vote, avortement…) mais d’après ses partisans, la loi d’interdiction du voile intégral est une loi féministe…
@sub c’est pas parce qu’il y a pire qu’on ne peut pas faire mieux 🙂
Tu habites aussi dans un rassemblement d’états (oui, au fait, ça a un nom, l’Europe politique) qui émet des remarques sur la politique des pays qui la composent ; étrangement, quand ces remarques porter sur l’inutilité des services publics, la libre concurrence, etc., ce sont des recommandations ; quand il s’agit de respecter le droit international, ce sont des avis d’emmerdeurs.
Et beau texte, merci.
J’habite dans un pays où un maître de conférences en sciences de l’information est payé à écouter des flash info toute la journée au lieu de faire de la recherche et de l’enseignement. Pauvre France.
J’habite un pays qui n’est pas le mien et pour lequel j’ai quitté amis et et famille. J’habite cette France que mes manuelles scolaires me présentaient comme le pays des droits de l’homme, de la liberté de parole, de la parité et de l’egalité. Ce pays qui aujourd’hui grace a ce gouvernement d’arrivistes et d’opportunistes de la misère perd peu a peu tout ce qui faisait sa grandeur et me rappelle de plus en plus ce que j’ai fui il y a des années dans mon « tiers monde ». Alors que faire ? Certains, me diront, si tu n’es pas content alors tu n’as retourner chez toi … Oui, j’y pense depuis plusieurs mois mais
Apas le mien et qui ne veut plus des gens comme moi ? Oui, j’y pense, mais comment expliquer à mon fils qu’ il va quitter ses amis son école et son pays, La France….
Merci pour cet article qui rappelle aux gens que la France n’est pas que le pays de Sarko.
« J’habite un pays dans lequel le président de la république utilise les services de l’état pour faire espionner un magistrat suspecté d’être à l’origine de fuites dans la presse sur une affaire de trafic d’influence touchant – au moins – un ministre et – probablement – le chef de l’état lui-même. »
J’habite aussi un pays où l’on bafoue chaque jour, sans preuves avérées, ni verdicts, ni jury, la présomption d’innocence.
Excellent.
J’ai réalisé récemment ( j’ai mis le temps ), qu’Hitler en son temps avait lui aussi rendu responsable de la grave crise économique qu’endurait alors l’Allemagne.
Il fallait s’attaquer aux juifs puis aux homosexuels, puis aux tziganes ! Ils étaient les responsable de la misère de la pauvreté, des désordres sociaux.
Nous voilà maintenant installé dans une tourmente économique aux impacts sociaux considérables.
En sarkozie, on commence donc par les Roms : qui seront les suivants d’ici 2012 ?
On sent tous ces relents de haine qui se lèvent aussitot devant les évocation de ces sinistres ministres.
Il est temps de rentrer en résistance (pacifique) ; heureusement notre histoire ne manque pas de modèle pour cela.
I live in a country. A few days in Sarkoland
This post is a translation of a post from Olivier Ertzscheid on his blog. It really reflects what I am thinking about the situation in France. I am reproducing and translating it here with his consent.
« J’habite aussi un pays où l’on bafoue chaque jour, sans preuves avérées, ni verdicts, ni jury, la présomption d’innocence. »
Il faut dire que l’exemple vient de haut : le ministre de l’Intérieur Sarkozy l’a joyeusement bafouée dans l’affaire du préfêt Erignac, tout comme dans l’affaire Zyed et Bouna. Et ces accusés-là n’avaient pas de chaines de télé prêtes à se faire le relais de leurs protestations outragées — ne parlons même pas du terme de « lapidation médiatique ».
Et nous habitons dans un pays où le Prince peut à son gré faire nommer des tribunaux de complaisance pour blanchir et indemniser indûment ses courtisans ( http://forum.capital.fr/f2/forum-general/t4873/petit-arrangement-entre-copains/ ) ou accabler ses ennemis ( http://www.leparisien.fr/politique/affaire-clearstream-villepin-s-oppose-a-un-tribunal-d-exception-10-09-2010-1062753.php ).
Génial résumé de tout ce qui fout le camp ! Mais la conclusion donne tellement l’impression qu’ailleurs l’herbe est plus verte… Le croyez vous vraiment ?
@Proactons => Godwin!! \o/
Des problèmes et des réflexions tellement globales, complexes et paradoxalement personnelles qui me rappellent une fois de plus que dès que l’on en vient à la politique et à l’information la plaie d’internet, ce sont les commentaires. Merci.
je trouve votre article stupide ; MAIS pourquoi donc allumer la radio ! ^^
Personnellement je ne suis plus l’actualité parce qu’on se sent tellement impuissant que oui je préfère faire l’autruche.
Tlm déplore la politique en france (f et non F) que ce soit au niveau de l’europe , l’ONU ou religieux mais ça ne change rien et qui est prêt a faire une révolution pour ça car les raisins de la colère se gonflent mais ne sont pas prêts de murir.
Bon après les commentaires sur hitler… ah oui ; enfantgatée a aussi repéré le godwin (ça m’a fait rire).
Il faut dire que l’exemple vient de haut : le ministre de l’Intérieur Sarkozy l’a joyeusement bafouée dans l’affaire du préfêt Erignac, tout comme dans l’affaire Zyed et Bouna.
@Veig: l’idée est donc de faire pareil ? drôle d’argument.
enfantgatee => godwin, c’était en 1990.
La définition sur Wikipédia note que « Si le sujet de la discussion était très éloigné d’un quelconque débat idéologique, une comparaison de ce genre est considérée comme un signe d’échec de la discussion ». Or nous sommes en plein dedans. Si en 1990 la crainte de la montée de l’extrémisme était plutot éloignée, l’environnement a bien changé depuis. Montée de l’extreme droite et inflammation xénophobe qui se propagent un peu partout, notamment chez nous par un gouvernement qui joue à l’apprenti sorcier avec ce levier.
Pour être sur le « terrain », je pense que sans résistance, nous nous rapprochons de plus en plus vers une situation sociale cahotique et très dangereuse.
Les (interessantes) conclusions sorties du relatif confort des années 1990 ne doivent pas amener en 2010 à assener l’anathème, comme un simple jeu de mot, tu l’as dit, c’est donc toi qui l’est ..
La vie réelle, elle nous amene à penser que oui, en 2010 « il est bien fécond le ventre de la bête immonde ».
Honnetement vous vous prenez la tete<<< C est pire dans beaucoup d autre pays. En France a part critiquer y a rien. Jamais content de rien. Vous etes des communistes ou quoi?
Magnifique texte, bon résumé de la situation actuelle de ce pays de m….
Tout cela est si bien dit. Nous sommes nombreux à penser ça sans savoir l’exprimer. Si quand même en descendant dans la rue. Mais pour ce qu’ils en font !!
ça fait du bien de lire tout ça, ça les emmerde que quelques uns ne se laissent pas impressionner par la presse.
on ne doit pas baisser les bras,
ce n’est pas forcément mieux mais ce qui est général c’est la contagion de la méthode fasciste pour faire endosser aux minorités visibles les trafics des sarkocraties.