C’est le dernier né de l’innovant Amazon. Le supermarché du web a notamment construit son succès sur le principe de la recommandation (ceux qui ont aimé … ont aussi aimé …) – recommandation parfois frauduleuse – et sur les revues de produits rédigées par les acheteurs/visiteurs. Après avoir pendant un pendant un temps collecté lesdites revues sur un support baptisé ProductWiki, Amazon lance donc aujourd’hui Amapedia, un Wiki avec enregistrement préalable, qui permettra à chacun de commenter son produit préféré.
Sur la page d’accueil du site on peut lire qu’Amapedia utilise un principe "nouveau" d’organisation, baptisé "collaborative structured tagging" :
- "(…) it makes it easy for
you to tag products with what they are and with their most important
facts, and for others to search, discover, filter, and compare products
by those tags."
L’explication la plus claire est à lire chez O’Reilly Radar. L’usager dispose de deux approches complémentaires dans son processus d’indexation :
- des facts tags (balises factuelles)
- et des category tags (balises catégorielles)
Plusieurs nouveautés là-dedans, et une révolution : l’usager est invité à se poser des questions avant de tagguer. Et pas n’importe quelles questions !
- La première est celle que connaissent tous les spécialistes des thesaurus et autres ontologies, c’est la question de la relation "est un" ("is a" en anglais). Socrate "est un" homme. L’A380 "est un" avion. Le Nifujikon 3215 "est un" appareil photo numérique.
- La deuxième est celle du degré de similarité ("most likely to be compared with"). Le Nifujikon 3215 "est plutôt comparable avec" d’autres choses de couleur argentée, ou "plutôt comparable avec" d’autres appareils photo numériques ? Avec d’autres appareils photos numériques.
- La troisième est celle du taux de partage des primo-attributs communs ("has the same important attributes as every other instance"). Le Nifujikon 3215 "a-t-il les mêmes attributs essentiels que" un appareil photo numérique (parmi lesquels attributs on trouve le "zoom optique", la "résolution", etc.) ? Réponse : Oui.
Ces trois questions correspondent aux balises catégorielles ("fact tags").
Passons maintenant aux balises factuelles ("facts tags").
- ils peuvent être uniques ("singleton") et comprendre seulement un nom
- ou composés ("multi-part") : un nom et une liste de valeurs sur les propriétés du produit. Exemple pour un film, on aurait des valeurs du genre
- Producteur : StudioCanal
- Acteur principal : Al Corley
- et ils (les tags factuels uniques ou composés) sont dotés … d’une syntaxe !!
- TagFactuel : valeur1, Valeur2, Valeur3 …
Le résultat, c’est que pour une requête donnée, les usagers disposent en colonne latérale de l’affichage :
- des catégories (jeux vidéo),
- de leurs attributs (année de parution, éditeur, plateforme …)
- et des principales instances de ces attributs (exemple pour l’attribut "plateforme" : windows2000, windowsXP, …).
R-E-D-O-U-T-A-B-L-E !! SUrtout lorsqu’il s’agit ensuite de pouvoir produire des comparatifs à la volée.
Et là … et là … vous me dites :
– "Mais c’est une classification à facettes !!" Et bé oui. Ils ont réinventé la classification à facettes.
– "Et vous croyez que ça va marcher ??" Et bé oui. Parce qu’Amazon ne part pas de rien, "from scratch". La base de connaissance constituée autour du catalogue est déjà considérable. Au pire, si les usagers ne suivent pas, Amazon pourra mettre en forme sa base de connaissance initiale avec ce nouveau système jusqu’à atteindre une masse critique suffisante pour "entraîner" l’usager.
– "Et l’usager justement, est-ce qu’il va se prêter au jeu ? Parce que là on n’est plus en train de de tagguer tranquillement sur FlickR en pensant à autre chose, on effectue un authentique travail documentaire à forte valeur ajoutée !!!" Et bé là … j’avoue que je n’en sais rien. Ou plutôt si. Je sais que la réponse dépendra de la manière dont le processus est interfacé. Mais je n’ai malheureusement pas pu tester ladite interface, le système refusant de prendre mon compte Amazon en m’indiquant : "you have never purchased anything from Amazon in the United States". Snif … Mais je parie que oui. Les usagers suivront. Parce que les usagers sont mûrs pour ce genre d’approche.
Prometteur donc. TRES prometteur. Ce pourrait être un intermédiaire idéal entre la folksonomie débridée et la rigidité taxonomique.
Voilà qui va me faire encore plus de choses à raconter en seulement 20 minutes mercredi prochain :-((
(Via Francis Pisani et Fred Cavazza)
A propos de l’indexation en langage naturel (tag) : le nouveau service d’Amazon
Nous restons sceptiques sur l’introduction de l’indexation des documents et des informations par l’usager lui-même (Tag). En tant que documentalistes nous en connaissons les limites.Amazon sort son nouveau service, Amapedia, un wiki qui permet à chacun
Il y a une petite erreur dans la phrase :
« Ces trois questions correspondent aux balises catégorielles (« fact tags »). »
A part ça, c’est très intéressant (et l’analyse l’est autant :)) mais la distinction me semble difficile : un « fact tag » peut être n’importe quoi, y compris un category tag. Il va falloir une certaine expérience aux utilisateurs pour bien choisir l’un ou l’autre.
En bon informaticien (« connaisseur » de ce genre de problème en modélisation/conception de programme), j’aurai tendance à renommer ces tags : « category tags » => tags relationnels (« qui met en relation avec »), « fact tags » => « tags attributs » (« qui décrit une propriété intrinsèque ») – ça reste très subjectif, une question de point de vue
Ou alors :
« category tags » => Collaborative Filtering
« fact tags » => Content Based.
mais c’est une déformation professionnelle.
Sur la recommandation (1)
L’abolition de l’esclavage compulsif du bibliothécaire face à ses collections permet de relancer la question globale de la recommandation dans la bibliothèque.
Sujet souvent abordé, jamais vraiment posé dans son ensemble, sans doute par manque de modè…