L’université du Michigan vient de fêter son millionnième livre numérisé (dans le cadre du programme Google Book Search). Elle a pour l’occasion :
- créée une page web dédiée.
- mis en ligne un diaporama très éloquent
- mis en ligne deux collections de photos sur FlickR : l’une rendant grâce aux petites mains de la numérisation, l’autre sur les détails de la numérisation.
C’est incontestablement un jalon historique dans la grande histoire de la numérisation, histoire pour laquelle Nicolas Morin rappelle l’argumentaire massu de Google : "Getting things done". Comme le rapelle par ailleurs Paul Courant, ce n’est là qu’une étape et il reste 9 ans pour atteindre l’objectif de 7,5 millions d’ouvrages numérisés, avec toute l’organisation bibliothéconomique que cela réclame.
Du côté de l’héxagone, on attend impatiemment le prochain salon du livre pour en (sa)voir un peu plus sur Gallica 2 qui – rappelons-le – présentera aussi bien des ouvrages libres de droits, que des ouvrages sous droits, en partenariat avec les éditeurs. Dans une récente entrevue au journal Libération, Bruno Racine revient sur ce projet dont je vous parlais déjà ici. Le même Bruno Racine donne également dans la rupture décomplexée et radicale avec son prédécesseur Jean-Noel Jeaneney : après avoir, pour ce dernier (Jean-Noel), tenté de mettre en ordre de bataille les bataillons bibliothéconomiques européens face à la déferlante de l’artillerie lourde Googléenne, le ton du premier (Bruno) se veut résolument plus pragmatique et court-termiste :
- "Selon moi, il n’y a pas de guerre de religion dans ce domaine. (…) En ce qui me concerne, je n’ai pas l’intention de faire
la leçon aux bibliothèques qui ont signé avec Google. La force du
modèle américain est de savoir faire converger par moments l’intérêt
privé avec l’intérêt public. Notre objectif doit être de faire
converger ces programmes distincts." Y’à qu’à demander.
Dans le même entretien, Bruno Racine rappelle que la décision de la BM de Lyon pour la numérisation de 500 000 ouvrages anciens est imminente et pourrait inaugurer le premier partenariat Français avec Google Books. Là encore, mon petit doigt me dit que le Salon du Livre 2008 devrait être riche en effets d’annonces …
Dans ce paysage agité, on notera avec attention que de plus en plus de bibliothèques étrangères, à l’image d’un pragmatisme initié par la British Library, signent parallèlement avec les deux principaux acteurs de cette course aux contenus : ainsi l’université de Columbia, après avoir signé en Décembre 2007 avec Google, vient de signer avec Microsoft dans le cadre de l’Open Content Alliance. Le communiqué ne donne pour l’instant aucun chiffre sur le nombre d’ouvrages concernés. On sait seulement qu’il s’agira d’ouvrages libres de droits et que :
- "Microsoft will digitize selected portions of the
Libraries’ great collections of American history, literature, and
humanities works, with the specific areas to be decided mutually by
Microsoft and Columbia during the early phase of the project."
Le point que je grasseye n’est pas anodin : ce n’est certes pas la première fois que les grands moteurs-numérisateurs s’intéressent, en tant que prestataires, aux collections qu’ils numériseront ("leur contenu, leur caractère encyclopédique et multilingue, leur état" …). Mais si cette démarche se systématise et si elle dépasse la simple prise de renseignements techniques nécessaires à la prestation, bref si les moteurs-numérisateurs se font également désormais les agents zélés de la force bibliothéconomique présidant au choix des collections et ouvrages à numériser … que restera-t-il aux bibliothécaires à part peut être à inventer une nouvelle forme de sérendipité bibliothéconomique, la prescription aléatoire 🙁
Enfin, sur ces questions je vous renvoie à l’intéressante table-ronde sur "Les perspectives de l’édition face à la numérisation" (.pdf) du colloque "Pour une nouvelle dynamique de la chaîne du livre", organisé en Octobre 2007 par la SGDL.