Nous sommes en Juin 2038. Nathan est lycéen. Il se prépare à passer son bac en humanités numériques. Il se présente devant le sas de dénumérisation de la cabine d'examen. Nathan est entièrement nu.
Il y a de cela quelques années, avec la multiplication des smartphones, l'éducation nationale avait décidé de les interdire et installé des brouilleurs dans les salles d'examen. Pour certaines filières scientifiques, certaines calculatrices disposant de fonction de mémorisation avancées étaient aussi interdites. Puis avec le lancement des lunettes connectées, des stylos connectés, des montres connectées (l'Apple Watch avait été lancée en 2015 et très vite nombre d'applications permettant d'y lire n'importe quel texte étaient apparues) et enfin des vêtements connectés il était devenu impossible de tout vérifier. <Mise à jour> Après avoir constaté l'inefficacité de la surveillance par des drones supposés repérer et brouiller les signaux ou les connexions, </Mise à jour> l'éducation nationale avait donc décidé de tout interdire. Les candidats passaient désormais leur examen entièrement nus, et pour préserver un minimum leur pudeur, les "salles d'examen" avaient été remplacées par des cabines d'examen individuelles.
Nathan était donc nu mais avant de pénétrer dans sa cabine individuelle d'examen pour l'épreuve de référencement naturel et celle des langues vivantes, il lui fallait encore passer le sas du scanner de dénumérisation. Alors qu'il n'était que collégien, en 2033, le chef du parti transhumaniste, désormais président des Etats-Unis, Ray Kurtzweill avait en effet autorisé la mise sur le marché de puces sous-cutanées de mémorisation permettant de transformer notre peau en écran et d'y afficher des informations comme sur n'importe quel terminal en utilisant une technologie issue de l'encre électronique reposant sur l'altération des pigments naturels de notre épiderme à l'aide de micro-décharges électriques parfaitement indolores. Ces puces sous-cutanées, en plus de l'ensemble des fonctions qui équipaient les smartphones des années 2010 (comme la géolocalisation), permettaient en outre, pour un forfait de 500 euros par mois et l'ajout d'électrodes neuronales installées dans notre cerveau à l'aide d'une intervention de micro-chirurgie qui s'était rapidement banalisée, de dédier un circuit synaptique au stockage de n'importe quelle information, un peu à la manière d'un disque dur ou d'une mémoire RAM "organique".
Les parents de Nathan faisant partie d'une communauté de technos-résistants, ils avaient d'abord refusé tout cet attirail avant de céder – comme l'immensité des parents de leur époque – aux suppliques de leurs pré-adolescents si légitimement soucieux d'être "comme les copains" et de disposer eux-aussi de leur puce sous-cutanée. Nathan et son frère aîné disposaient donc de leur puce depuis leur entrée au lycée. Leur soeur qui venait d'entrer en quatrième n'aurait la sienne que dans 2 ans. Mais ils avaient tenu bon et réussi, jusqu'ici, à refuser l'intervention de micro-chirurgie et l'ajout d'électrodes neuronales. L'implantation de cette puce était régie par un certain nombre de règles de bio-éthique. Elle ne pouvait pas être installée sur des enfants de moins de 8 ans et l'installation devait se faire sur l'avant bras gauche pour les droitiers, et sur l'avant-bras droit pour les gauchers, laissant ainsi la possibilité à chacun selon ses dispositions génétiques de pouvoir "écrire" – ou plus exactement se servir du clavier – à même sa peau.
Nathan se présenta donc entièrement nu dans le sas de dénumérisation. Une sorte de scanner géant vertical le balaya verticalement, de haut en bas, puis de bas en haut. Une voix métallique lui demanda alors de se retourner, et le même balayage vertical reprit une deuxième fois. La puce installée dans l'avant-bras droit de Nathan fut détectée par le scanner et Nathan prié de se diriger vers une cabine d'examen "pour gauchers". Avant de pouvoir accéder à sa cabine il restait encore à Nathan à passer dans les toilettes pour pratiquer une analyse de ses selles afin de vérifier qu'il n'avait pas absorbé l'une de ces pilules circulant sous le manteau et permettant d'apprendre n'importe quelle langue vivante. Nathan put enfin pénétrer dans sa cabine individuelle d'examen. Elle était équipée d'un écran sur lequel s'affichaient les sujets, d'une chaise et d'un petit bureau d'écolier pourvu d'un écran tactile, bureau à la gauche duquel se trouvait fixé un long tube noir isolant équipé d'un dispositif de neutralisation du signal, dans lequel Nathan glissa son avant-bras droit. Un léger clic retentit, et Nathan sentit que son avant-bras était désormais immobilisé et qu'il ne pourrait le retirer qu'après avoir activé le bouton de "fin d'épreuve" sur la tablette qui lui faisait face. L'examen pouvait commencer.
Une fiction qui pourrait arriver bien plus vite que l’on ne pense. Mais bon, comme on arrête pas le progrès. Aujourd’hui, on révise bien le bac avec un smartphone.