Je viens de recevoir une lettre. En recommandé avec accusé de réception. Un courrier de Véronique Cardi, directrice général du Livre de Poche. En 15 ans de blogging, dont 10 en solitaire sur Affordance, après plus de 3000 articles, c'est la première fois que je reçois une lettre de "mise en demeure".
Celle-ci était attendue. Elle concerne la "libération" illégale des deux fichiers du journal d'Anne Frank. Le plus étonnant est qu'elle n'arrive que maintenant. Un mois après l'article dans lequel je mettais illégalement à disposition ces 2 fichiers. Que de choses se sont passées en un mois. La plupart de mes camarades (mais pas tous) ont également reçu ce courrier. Romaine Lubrique l'a mis à disposition sur son site. Pourquoi attendre un mois avant de nous adresser cette mise en demeure ? Probablement pour éviter un effet Streisand, probablement pour attendre que l'ouragan médiatique soit calmé et ne pas passer pour les grands méchants au coeur de la tempête. Mais un mois équivaut à un siècle sur les internets. Les fichiers, je l'ai déjà rappelé, étaient déjà partout illégalement disponible en quelques clics depuis n'importe quel moteur de recherche. Ils continuent de l'être. Mais un grand nombre de ceux qui les ont illégalement téléchargé depuis un mois l'ont fait en ayant conscience du problème que pose l'extension abusive des droits, et, je l'espère en tout cas, de l'importance que revêt le domaine public.
Je retire donc ces fichiers de mon site. Et renouvelle mes excuses aux traducteurs français du journal, les seuls en réalité à avoir été réellement floués par mon initiative et ses nombreuses reprises.
C'est marrant cette histoire quand même. Les premières, rares et seules photos des camps d'extermination ont été prises par des kapos nazis : au sortir de la guerre, les "grandes nations" se sont mises immédiatement d'accord pour qu'elles soient, sans délai aucun, versées dans le domaine public. Le procès Eichmann, idem. Un témoignage essentiel pour l'histoire. Domaine public instantané, immédiat, irrévocable et incessible. Janvier 2016 : ce sera le tour de "Mein Kampf". Mais 70 ans après la mort de son auteur, le fonds Anne Frank continue d'affirmer vouloir refuser cette entrée.
Vous pouvez vérifier. La phrase la plus célèbre et la plus fréquemment citée du journal d'Anne Frank est celle-ci :
"No one has ever become poor by giving."
A compter du 1er Janvier 2016, conformément aux engagements pris, et conformément à la loi, nous, citoyens, politiques, "donnerons" à l'oeuvre d'Anne Frank la seule place qu'elle mérite : celle du domaine public. Parce que le domaine public n'est pas "Het Achterhuis", il n'est pas cette "annexe", il est notre maison commune, celle de l'échange, celle du souvenir, celle où se construit et se perpétue la mémoire collective grâce à l'accès autorisé aux oeuvres, sans contraintes, sans restrictions, sans dissimulation.
Voici le fameux courrier, dont j'accuse réception.
Paraphrasons: « No one has ever become poor by linking. »
Mais on dirait qu’avec cette lettre d’avocats, ça se se pourrait!
Une « directrice générale » du Livre de Poche qui ne sait même pas comment on abrège « Monsieur »?
Ça en dit long sur la haute compétence en jeu…
Monsieur : « M. »;
« Mr » = Mister !
L’expression traduttore traditore trouve là tout son sens.
Je suis mille fois pour ce combat qui n en sera pas un.
J ai mis en ligne sur le lien suivant le journal d Anne Franck en version non censurée pour appuyer vos dire :
http://www.qu-est-ce-qu-elle-a-ma-gul.com/2016/01/02/cette-polemique-sur-anne-franck-ma-ennerve/