Les dingues et les deux paumes.

Il y a la paume de Trump. Au-dessus de la Bible. Prêtant serment. Il y a la paume de Musk. Au bout de son bras tendu. Répétant par deux fois un salut nazi.

Deux paumes tendues ou dressées. Et toute une partie de l’humanité, qui les regarde, totalement paumée.

La chorégraphie signant YMCA a bien changée … 

 

Ces deux paumes se font écho. L’une précédant l’autre. L’autre juste un peu au-dessus de la première. Mais à la fin les deux paumes se rencontrent. Toujours.

Et puis il y a cet aréopage, cette « nouvelle internationale réactionnaire« , Farage, Meloni, Milei, Zemmour … Et que dire des autres, directement issus d’une version 4K remastérisée d’Idiocracy. Les dingues et les paumés.

Il aura donc fallu moins de quelques heures après l’investiture de Trump pour que l’un des hommes ayant le plus contribué à la faire advenir se fende d’un salut Nazi. Par deux fois.

Il est tout à fait fou d’entendre et le lire la presse ce matin. Qui « s’interroge ». Sur ce geste qui « ressemble » à un salut Nazi. Qui « fait penser » à un salut Nazi. Qui « serait » un salut Nazi. Qui représente un salut « Nazi » entre guillemets. Tous ces titres de presse et ces traitement médiatiques existent, sans même parler des différentes « fan base » qui viralisent l’ensemble. Pourtant rien, absolument rien n’est plus clair, codifié, lisible, ancré dans la mémoire de l’humanité qu’un salut Nazi. Ce salut Nazi c’est « le geste le plus politiquement connoté du 20ème siècle » comme l’écrit Olivier Tesquet.

Et il n’y a absolument aucune forme de doute ou d’interrogation à avoir. Musk est au moins autant mentalement instable qu’il est ivre de pouvoir et de richesse. Et Musk est fondamentalement raciste. Musk n’est pas le porte-voix d’une internationale réactionnaire mais d’une internationale d’extrême-droite. Ce salut Nazi n’a rien d’inattendu de la part d’un homme qui a rétabli les pires comptes antisémites sur sa plateforme, qui soutient ouvertement toutes les extrêmes-droites les plus radicales dont encore récemment l’AFD.

C’est très exactement ici, dans ce geste que tout le monde a vu, que se mesure probablement l’essentiel et l’ampleur de son triomphe et de celui de Trump. Non pas par ce que dit ce geste : la racisme, l’antisémitisme, la haine à l’état brut, une haine prévisible, documentée, qui a valeur de projet. Mais par l’incapacité de décrire ce geste pour ce qu’il est. Par le « débat » qui s’installe sur l’évidence d’une monstrueuse monstration. Il ne s’agit pourtant pas d’un « Deep Fake » ; il n’est pourtant besoin de nul recours à une IA pour l’encoder ; ce n’est pourtant pas un « fait alternatif ». C’est juste un putain de salut nazi répété par deux fois. Un putain de salut Nazi qui n’est plus discuté dans le champ social pour ce qu’il est mais pour la possibilité qu’il puisse être autre chose : un moment « d’égarement », un « enthousiasme mal contrôlé » (sic).

A l’heure où les derniers survivants centenaires des camps s’éteignent, il va nous falloir faire de la politique. Ou ils emporteront tout. Absolument tout. Et se souvenir que oui, « It is OK to punch nazis« .

[Mise à jour du 23 Janvier] Je viens de lire cette analyse de l’artiste Grégory Chatonsky, absolument remarquable et qui dit, bien mieux que je ne l’esquisse dans mon article, l’importance de ce que ce geste implique.

Le texte analyse comment le salut nazi d’Elon Musk a été banalisé par un processus de comparaison similaire au fonctionnement des IA. Comme ces dernières transforment les images en vecteurs statistiques sans considération pour leur contexte, la société actuelle dilue la signification des gestes historiques en les comparant à d’autres images similaires. Cette évolution reflète un changement profond dans notre rapport aux images, passant de la copie indicielle à une production statistique de possibilités. Ce phénomène, qui profite au « carbofascisme » contemporain, révèle que notre réalité est devenue un espace où tout n’existe qu’à titre de possibilité.

C’est brillant. C’est limpide. C’est essentiel. Filez lire Grégory Chatonsky.

2 commentaires pour “Les dingues et les deux paumes.

  1. « Et il n’y a absolument aucune forme de doute ou d’interrogation à avoir.»

    Merci… plus que le geste je pense c’est cet aveuglement de la presse devenue absolument incapable de dénoncer l’immonde…

  2. J’ai expliqué, en commentaire de l’article de Gregory Chatonsky sur FB, que c’est par ailleurs la séquence des gestes qui fait le salut nazi. Pas juste la main sur le coeur, ou le bras dressé, ou la paume tendues, mais les trois enchaînés rapidement, dans un élan bien précis empreint de discipline militaire, buste tendu, fesses serrées. Cela, une photo ne peut le montrer. Seule une vidéo le peut.
    Voilà pourquoi, dans le cas qui nous intéresse, aucun doute n’est permis.
    Le deuxième élément est la contextualisation du geste par le discours et les faits : soutien apporté à l’afd allemande, par exemple. Propos racistes et xénophobes tous les jours sur X.
    Aucun doute n’est permis, aucun.

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