Titres alternatifs de ce billet :
- "Ceci n’est pas une pipe."
- "Une petite pipe pour Yahoo!, un grand pas pour la recherche d’information ?" (pardon, je n’ai pas pu résister … et puis c’est vendredi)
Redevenons sérieux …
Yahoo! vient de lancer un nouveau service baptisé Yahoo!Pipes. Traduisez : "Yahoo!Tuyaux." L’idée est de mettre à disposition de tous une interface graphique simplissime asez simple permettant de faire de la programmation, un peu sur le modèle des "Pipes Unix"
- "Un "pipe" (tuyau) est un canal de communication entre deux programmes, reliant la sortie de l’un à l’entrée de l’autre. L’idée (à la base de la philosophie Unix) est de réaliser des tâches complexes en chaînant plein de programmes simples ensembles." Grand merci Nicolas pour cette lumineuse explication 🙂
Donc par exemple, on prend des sources d’information, on les couple, on leur pose une question (un mot-clé), on applique diverses instructions (tri, dédoublonnage, affichages divers), et au final on offre à l’usager un tuyau par un bout duquel il entre un terme et à l’autre bout duquel il ressort … de l’information. Voilà pour une "pipe", un "tuyau" orienté recherche d’information. Mais il existe quantité d’autres usages et d’autres applications :
- illustrer automatiquement tous les articles du New-York Times à l’aide de photos du service FlickR
- construire automatiquement un seul fil RSS pour récupérer les résultats de Yahoo! + Google + MSN + Technorati + qui vous voudrez.
- etc …
- <Update>voir d’autres précieux exemples d’usages</Update>
- <Update encore>Encore une application très intéressante pour récupérer directement des flux RSS automatiquement traduits. </Update encore>
Bref des possibilités quasi-infinies de mettre en place diverses actions relevant de la recherche d’information, sur n’importe quelle(s) source(s), originelle(s) ou composite(s). Et le tout, "relativement" facilement pour un internaute moyen (mais les geeks iront quand même beaucoup plus vite que les autres …).
Tout cela s’inscrit dans une dynamique de plus en plus nette d’atomisation, de fragmentation, de segmentation du monde de la recherche d’information. Ou plus exactement "des" mondes de la recherche d’information.
Premier monde : Google. 1 moteur. 1 affichage sous forme de liste (ne changeons pas ce qui marche depuis des millénaires)
Deuxième monde : en voici une rapide approche historico-descriptive …
- Premier temps : Communautarisation. la vague des signets partagés (l’usager construit, agrège ses sources et le fait partager à une communauté). Les moteurs lui emboîtent le pas et rachètent/proposent leurs propres communautés
- Deuxième temps : Fragmentation. Celle permise par l’explosion du RSS, qui offre aux chercheurs d’information de tous poils l’accès à une granularité quantitative et qualitative jusqu’ici impossible à atteindre. Les moteurs lui emboîtent le pas et proposent la plupart de leurs "résultats" au format RSS (notamment les "news")
- Troisième temps : Mixage. C’est l’ère des Mashups. Celui du couplage. Mixage entre services et/ou mixage entre (un) moteur et (un/des)) service(s).
- Quatrième temps : Personnalisation. Chacun fabrique "son" propre moteur
(Google Co-op), choisit "ses" sources, met en place ses "macros"
(LiveSearch) … avec le risque qui se profile des autarcithécaires … - Et cinquième temps donc … la plomberie, les tuyaux, l’usager-plombier. L’avenir dira si c’est pour le meilleur (automonie, valeur ajoutée, etc.) ou pour le pire (plombier-polonais de la recherche d’information ??). Un cinquième temps qui marque de manière encore plus radicale la rupture entre, non pas simplement contenant et contenu, mais entre contenant, contenu et procédures.
Ces vagues successives sont révélatrices d’une évolution :
- des besoins (plus granulaires, plus spécifiques, plus orientés vers des requêtes de proximité – une pizzeria près de chez moi – ou transactionnelles – le billet d’avion le moins cher – ,
- des pratiques (nomadisme informationnel, micro-terminaux)
- des usages (social search)
- des modèles économiques (segmentation du marché, marchés "de niche")
- des sources et des autorités constituées, aussi bien dans le monde universitaire (cf les harassants/vivifiants débats sur Wikipédia) que dans le monde marchand (la meilleure agence de voyage du monde, ou en tout cas la plus visitée "n’est que" un moteur qui compile et trie des sources, idem pour la meilleure agence immobilière, etc…)
L’usager technophile et "early-adopter" (qui s’il peut apparaître aujourd’hui minoritaire, sera clairement majoritaire demain), est donc aujourd’hui convié à évoluer dans une sphère socio-technique dont "on" lui offre de maîtriser les outils, les environnements, les procédures, les techniques. Les données, ainsi soumises ou souscrites, tournent à leur plein rendement pour produire de l’information, ce qui est dans la nature des choses (au moins pour les théoriciens de l’information et de la communication).
(Rappelons au passage l’importance de la transformation du web en base de données dans cette évolution)
Update : Read/WriteWeb est d’accord avec moi sur ce point – ce qui fait plaisir 🙂 – et développe une approche plus "techniciste"/"procédurale" que la mienne en indiquant que le développement de Yahoo!Pipes est "l’application de l’ancienne sagesse des bases de données relationnelles au monde du web")
Il reste encore à inventer et à déterminer de quelle manière ces phénomènes (mixages, communautarisation, fragmentation, personnalisation, etc.) et les contours du nouvel environnement informationnel qu’ils dessinent (fractal ET rhizomatique), laisseront place à de la "connaissance". Ou comment la(les) connaissance(s) s’y invitera(ont). Question sans réponse pour l’instant, même si je suis convaincu que les bibliothèques et les folksonomistes, s’ils ne les laissent pas filer, ont en main quelques cartes maîtresses.
En tout état de cause, il semble qu’avec ce nouveau service de plomberie, Yahoo! offre à la recherche d’information le chaînon manquant d’une triple hybridation entre usagers, sources et procédures, de la même manière qu’il y a peu, Amazon avec Amapedia, offrit le sien à l’hybridation nécessaire des modes d’indexation.
Pour approfondir …
- et se faire une idée du débat blogosphérique anglo-saxon sur cette nouveauté : voir les liens sortants du billet de SearchEngineLand.
- Voir également le billet de Read/WriteWeb qui souligne justement que l’avenir est au mixage des fils (RSS).
- Même Google trouve ça génial !
- Update : l’info chez Outils Froids & chez Influx
- Update encore : explication très pédagogique et "pas à pas" chez Toile Filante
- Update toujours : Robin Good profite de cette plomberie 2.0 pour annoncer la naissance d’une nouvelle pratique : le Newssmastering, déjfinie comme suit : "The opportunity for sustainable filtering and aggregation of online content into niche websites and dedicated information channels." (Via Martin Lessard)
Merci pour l’info c’est tout simplement énorme ce qu’on doit pouvoir faire avec un tel outil!!!
Beaucoup de blogueurs voient ce service comme une révolution. Pour l’instant en ce qui me concerne, je voit bien que l’information devient « liquide »comme c’était évoqué ici http://www.internetactu.net/?p=5809, et pourtant:
L’interface est hyper belle, mais je trouve que le coté « la programmation pour les nuls » est loin d’être abouti!
Moi qui ne suis que bibliothécaire et moyennement geek, je suis incapable (pour l’instant) de comprendre et d’utiliser cet outil…
Vers un web granulaire ?
Alors que se profile un web plus granulaire, permettant de composer des sites web complexes à partir de pièces détachées, cette perspective semble peiner à se concrétiser. A croire quil nest pas si évident que cela que de partager ou d…
Je suis dans le même état d’esprit que bibliobsession. L’outil est fort complexe et je ne suis pas prêt d’en maîtriser toutes les focntionnalités.
Alors pour ce qui est de convaincre d’autres personnes de l’utiliser lors de stages, il va y avoir du boulot.