Jean Véronis : promesse tenue

De ces matins ou la lecture de Twitter voit émerger le hashtag #RIP. Suivi du nom de quelqu'un que l'on estime. Où l'on se dit "et merde", et où la peau frissonne.

Je ne connaissais pas Jean Véronis. Je ne l'avais jamais rencontré. Pas même croisé dans un colloque. Pas davantage dans un café. Pourtant je connaissais Jean Véronis. Car comment sinon être triste de la mort de quelqu'un que l'on ne connaît pas. Sinon pourquoi ce besoin d'écrire quelque chose.

Je connaissais Jean Véronis. J'avais découvert son blog. J'étais accroc. Je l'avais même interviewé à l'époque (2005) ou les universitaires français tenant réellement un blog étaient aussi nombreux que les buts de l'équipe de france de football et aussi bien vus que certains attaquants au rendement inversement proportionnel aux libertés prises dans leur ornement capillaire. Je lisais le blog de Jean. Et comme un cadeau, Jean lisait mon blog. J'étais jeune maître de conférences et pas grand chose d'autre, il était professeur 1ère classe, directeur de recherche, autorité incontestée du TAL (traitement automatique des langues) et tout le toutim. Sans le connaître, sans le rencontrer, nous avons échangé. Plusieurs de nos thématiques de recherche, de nos billets de blog, se faisaient écho. Je me nourrissais de ses recherches, de ses curiosités, du savoir qu'il partageait avec moi et avec la foule de ses lecteurs. S'il n'avait pas décidé, d'abord pour ses étudiants, de partager un peu de ses réflexions, s'il n'avait pas ouvert son blog, s'il ne s'était pas pris au jeu avec passion, avec rigueur, et avec régularité, si les blogs n'avaient pas existé, si … si … si … si … alors je n'aurais jamais connu Jean Véronis.

Pour tout cela, une pensée pour lui et pour ses proches, que je ne connais pas. Un grand merci aussi. Pour cela. Pour avoir cru à la promesse originelle du web : un homme, une page, une adresse. Pour avoir fait de cette adresse, de cette page, un lieu de rencontre, un lieu de partage. Présence ténue à l'échelle du bruit planétaire. Mais incontestablement, promesse tenue.

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