C'est peu dire que tout bouge actuellement beaucoup à tous les niveaux de ce que l'on appelle parfois pudiquement le "service public d'éducation". De la maternelle (ou les "enseignants-changeurs de couches et organisateurs de siestes" ont reçu les excuses de leur ministre) au primaire (où les enseignants de fin de cycle 2 et 3 sont de plus en plus nombreux à refuser de faire remonter au ministère le bilan des "nouvelles" évaluations destinées à mettre les écoles en concurrence), dans les lycées et collèges (où les lycéens ont eu très momentanément gain de cause), dans les IUT bien sûr, et plus récemment donc à l'université (cf le précédent épisode du "feu aux poudres"). Alors à observer tout cela bouger, se remuer on se dit que cela finira bien par amener des résultats … Et puis il y a des signaux faibles. Dernier en date desdits signaux, c'est l'ABF, l'association des bibliothécaires de France, qui prend son tour de ras-le-bol. Et croyez-moi (ils me pardonneront ici mes ci-dessous taquineries en sachant le respect que j'ai pour ce corps de métier à la si certaine mais souvent si mal reconnue nécessité), croyez-moi disais-je, quand l'ABF sort de ses gonds, quand l'ABF prend la plume pour écrire un courier à Valérie Pécresse pour s'alarmer de la disparition programmée de la "sous-direction des bibliothèques", c'est le signal de l'insurrection, de la lutte finale, la promesse que le bras vengeur et armé de la populace va bientôt s'abattre avec fracas sur le crâne sonnant creux de ces élites alitées à nos frais. Quand l'ABF entre en lutte c'est un peu comme quand le PSG marque un but : le sentiment de l'erreur d'appréciation arbitrale le dispute longtemps à l'étonnement face à l'improbable. Et l'on se dit que tout peut repartir sur de nouvelles bases.
Allez, fi de ces taquineries (j'ai besoin de me détendre entre deux AG), plus sérieusement, une (toute) petite revue de liens sur les billets et articles qui ont marqué mon attention ces derniers temps dans le cadre du démantèlement systématique de tous les fondements d'un enseignement laïque et simplement républicain.
- Dans Mediapart, lire la tribune d'Arnaud Monthubert (récente recrue du PS et ancien président de l'association Sauvons la Recherche). Court extrait : "Ainsi, bien que le président se soit engagé à augmenter le financement
de l'enseignement supérieur et de la recherche de 1,8 milliards par an
(hors "plan campus"), c'est le secteur qui supporte les plus fortes
annulations de crédits en 2008 (450 millions) ! Les budgets 2008 et
2009 stagnent en euros constants, exception faite des sommes
pré-affectées pour combler le retard en matière de retraites. Plus de
mille emplois seront perdus en 2009 : pour la première fois sans doute
dans notre histoire, des suppressions toucheront aussi les universités,
dans les plus prestigieuses comme dans les plus pauvres ; pendant ce
temps la précarité explose pour tous les métiers des universités et de
la recherche. Quant au très contesté "plan-campus", même les
parlementaires UMP doutent que les sommes réellement débloquées soient
celles qui ont été promises. Le seul financement en très forte
croissance est le crédit-impôt recherche des entreprises, sans qu'on
ait la moindre étude fiable montrant l'efficacité de ce dispositif pour
la recherche privée." - la tâche d'huile de la contestation qui s'étend, et les appels à des actions plus radicales qui se multiplient … Partout en France se tiennent des AG, formelles ou informelles, dans de grands ou de petits amphis, réunissant de plus en plus de personnels et surtout de plus en plus de catégories de personnels : les IATOSS (personnels techniques et administratifs), parmi les plus essentiels au fonctionnement de l'université et de la recherche mais également parmi les plus "invisibles" parce que trop souvent les plus précaires ou les plus "exposés" à une hiérarchie, les IATOSS entrent à leur tour dans la danse.
- Partout en france on ne compte plus les différents appels, voire même les "appels des appels", les amorces de radicalisation avec des appels à la grève illimitée ou à des démissions administratives massives, ici et là de grandes écoles montent également au créneau.
- Partout en France, pour une pétition qui ferme, ce sont deux autres qui s'ouvrent.
Alors bien sût tout cela est brouillon, alors bien sûr tout cela est confus, alors bien sûr tout cela illustre parfaitement la stratégie connue d'un gouvernement qui se complaît à allumer toujours davantage de feux qu'ils ne pourra en éteindre en misant sur l'impossibilité de lutter en contre-feux de manière coordonnée sur tous les fronts simultanément, alors bien sûr les actions de contestation symboliques se superposent avec des actions plus classiques et d'autres plus radicales. Mais Madame la Ministre, mais Monsieur le Président, je vous le dis ce soir, il y a des signes qui ne trompent pas : en ce moment le PSG a la gagne, et vous avez sur votre bureau un courier de l'ABF. Y va y'avoir du sport.
(Temps de rédaction de ce billet : 2h05 // spéciale dédicace au vainqueur de l'appel d'offre ministériel : le champ lexical de ce billet va beaucoup vous plaire 🙂