La mémoire et l’amer.

J'étais donc vendredi sur Paris, dans le cadre de la troisième saison des ateliers du dépôt légal du web. En compagnie d'Hubert Guillaud nous avons discuté autour de la mythologie des grands nombres de l'internet et tenté d'equisser quelques pistes sur la manière dont le même web bouleverse aujourd'hui la manière de "faire mémoire" et ce que cela change dans la perspective – et les enjeux – d'une archive publique.

Au-delà des thèmes déjà traités sur ce blog et que vous retrouverez dans le diaporama ci-après, il m'a semblé intéressant d'articuler mon discours autour de 2 logiques mémorielles, 2 logiques d'engrammation en opposition frontale : celle de l'algorithme et celle de l'archiviste, de l'itération et de la collection, et des frontières de plus en plus floues entre une logique du "matching" (retrouver des résultats / documents qui "correspondent" à une requête, qui la "croisent" littéralement, qui la contiennent) et une logique du watching (choisir de mémoriser, d'archiver des résultats / documents qui proposent une vision du monde, une "vue sur" le monde). Tout cela est illustré notamment dans les diapos 28 et 29. Et sur l'opposition entre "watching et matching", on pourra toujours relire cet excellent article ;-), notamment ce passage :

"Quand nous consultons une page de résultat de Google ou de tout autre moteur utilisant un algorithme semblable, nous ne disposons pas simplement du résultat d'un croisement combinatoire binaire entre des pages répondant à la requête et d'autres n'y répondant pas ou moins (matching). Nous disposons d'une vue sur le monde (watching) dont la neutralité est clairement absente. Derrière la liste de ces résultats se donnent à lire des principes de classification du savoir et d'autres encore plus implicites d'organisation des connaissances. C'est ce rapport particulier entre la (re-)quête d'un individu et la (re-)présentation d'une connaissance qui était présente dans les bibliothèques de la Haute-Egypte, pour en être évacuée avec l'arrivée des principes de classement alphabétiques.
 
Une nouvelle logique se donne à lire. Moins « subjective » que les principes classificatoires retenus par une élite minoritaire (clergé, etc.) elle n'en est pas moins sujette à caution. Les premières étaient douteuses mais lisibles, celles-ci le sont tout autant parce qu'illisibles[2], c'est-à-dire invisibles : l'affichage lisible d'une liste de résultats, est le résultat de l'itération de principes non plus seulement implicites (comme les plans de classement ou les langages documentaires utilisés dans les bibliothèques) mais invisibles et surtout dynamiques, le classement de la liste répondant à la requête étant susceptible d'évoluer en interaction avec le nombre et le type de requêtes ainsi qu'en interaction avec le renforcement (ou l'effacement) des liens pointant vers les pages présentées dans la page de résultat."

Voici le support de ma présentation :

 

 

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