J’étais hier à la BPI pour présenter le "web 2.0" à un aréopage des bibliothécaires de ladite BPI dans le cadre des Mardis de la BPI (après-midi de formation et d’information réservée à ces mêmes personnels).
Mon intervention est consultable en ligne sur Slideshare (et vous pouvez récupérer le fichier .ppt)
Après moi intervenait l’un des responsables informatiques de la BPI avec un constat attristant : rien n’est prévu dans le cadre du web 2.0, la BPI ne dispose pour l’instant que d’un seul fil RSS qu’il met lui-même à jour manuellement directement dans le fichier XML (si, si …). Un nouveau site devrait voir le jour en 2008, qui devrait comprendre quelques vrais fils RSS automatiques pour les principales rubriques. Minimum syndical donc et avec un grand retard sur nombre d’autres bibliothèques, mais il est vrai que pour des structures de cette taille, le moindre ajout d’une ligne de code dans une application s’avère rapidement et administrativement kafkaïenne. C’est à peine s’il ne faut pas demander un audit et rédiger trois appels d’offre pour aller prendre un café 🙁 Bref, ce que je trouve surtout dommage, c’est que ce genre de structure soit contrainte de passer par tout un tas de prestataires externes, qui leur vendent des sites web et des portails documentaires bridés et non-évolutifs parce que non-ouverts. D’autant que je suis prêt à prendre les paris que toutes les compétences informatiques existent en interne pour déployer de tels outils. Avoir toute liberté de les utiliser serait un gain de temps (et d’argent …) plus que précieux. Et si tel n’était pas le cas, ce serait encore plus navrant qu’une
institution comme la BPI ne dispose pas en interne de toutes les
compétences nécessaires au déploiement d’un site internet adapté, de
"son" site Internet 2.0. Il serait grand temps que chaque bibliothèque se trouve dotée d’une vraie cellule TICE ou Multimedia,
avec des vrais bibliothécaires informaticiens, c’est à dire des gens
formés en informatique et sensibilisés aux politiques culturelles et
bibliothéconomiques, ou des gens formés à ces dernières, et dotés de
réelles compétences en informatique. Et que l’on arrête le bricolage, les
usines a gaz et la soviétisation de la gestion de projet. Mon sentiment de frustration fut d’autant plus fort qu’il paraissait être partagé par le responsable informatique en question ainsi que par une bonne partie de la cinquantaine de bibliothécaires présents.
Mon autre étonnement vînt de quelques réactions assez emblématiques, après ma présentation, du type :
"mais c’est quoi un wiki, c-o-n-c-r-è-t-e-m-e-n-t ?", "bon d’accord mais à quoi ça sert à part le côté gadget ?", "et comment fait-on pour s’assurer que tout le monde ne va pas écrire n’importe quoi dedans ?". Attention : on a parfaitement le droit de ne pas savoir ce que c’est qu’un wiki tout en étant bibliothécaire à la BPI. Mais … pour enseigner aussi bien des techniques web 2.0 (wikis, blogs, RSS) ET des compétences documentaires et bibliothéconomiques (langages de classification, catalogage) à des étudiants d’IUT se destinant à des carrières dans les bibliothèques, il me semble qu’il y a tout de même un très gros effort à faire du côté des politiques de formation. Superposer une fracture technologique a une fracture générationnelle n’est jamais bon. Pour être dans le vent, un "grenelle de la formation en bibliothèque" serait le bienvenu pour sortir de l’impasse actuelle dans laquelle
s’engage tout un pan de la filière "dite" culturelle, impasse en bout
de laquelle, soit dit en passant, le gouvernement actuel est déjà prêt à tirer les barbelés après y avoir fait entrer tout le monde, pour être bien sûr que plus personne n’en sorte. La bibliothèque d’aujourd’hui (le retard pris est déjà suffisamment criant), en plus de tout le
reste, me semble avoir un besoin urgent d’autre chose, d’autres services,
d’autres expérimentations, d’autres propositions, d’autres modalités de
lecture "publique". Ne pas lui donner les moyens de le
faire revient à se tirer une balle dans le pied et à entrer en claudiquant dans une économie ou une société de la connaissance. Aux Etats-Unis, au Canada, les métiers des bibliothèques sont reconnus comme des secteurs stratégiques,
s-t-r-a-t-é-g-i-q-u-e-s, et il serait là encore grand temps que notre ministre de la culture et celle de l’enseignement supérieur et de la recherche fasse autre chose que de s’efforcer de transformer des stéréotypes persistants en caricatures durables !!!
Dernière frustration enfin, mais bien plus positive, celle de n’avoir pas eu le temps d’échanger davantage autour de questions qui furent posées et qui me paraissent essentielles : par exemple sur les questions de
validation, ou bien encore sur les différences entre "le temps de la bibliothèque" et
le temps des outils web 2.0.
Merci donc au service formation de la BPI pour son accueil, aux participants pour leurs stimulantes et révélatrices questions, et bon courage pour le virage du web 2.0 🙂
Bonne analyse, je partage cet avis (pour avoir participé à des projets avec cette institution), je ne ferai pas de commentaires supplémentaires, à part peut-être : bonne chance pour le virage du web 2.0.
Vive Typo3 !